Discriminations et inégalités à l’école

Thibert Rémi (2014). “Discriminations et inégalités à l’école”. Dossier de veille de l’IFÉ, n°90, février

Disponible au format pdf : DV 90-fevrier-2014

Résumé

La lutte contre les discriminations à l’école n’est devenue une préoccupation politique que récemment et s’inscrit dans une prise de conscience grandissante au niveau des instances internationales et européennes en particulier. En France, la loi de 2008 permet une mise en conformité avec le droit européen, et la loi d’orientation et de programmation du 8 juillet 2013 reprend à son compte la lutte contre les discriminations à l’école.
Si les discriminations directes dans l’Éducation ne sont pas très fréquentes, les discriminations indirectes et systémiques sont très difficiles à repérer. Le concept de discrimination ne fait d’ailleurs pas l’unanimité, certains préférant parler d’inégalités, d’équité, d’égalité des chances ou encore d’ethnicisation des rapports. En France, les recherches en sociologie ont longtemps privilégié les rapports entre classes sociales. Pourtant, le concept de discrimination permet de renouveler la manière d’aborder les inégalités.
L’école, de par la place particulière qui est la sienne, se fait l’écho des discriminations à l’œuvre dans la société, et par son fonctionnement institutionnel peut même renforcer ces discriminations, jusqu’au sein même des établissements et des classes, à travers des pratiques pédagogiques parfois bienveillantes, des préjugés non conscients ou encore des manuels scolaires qui reproduisent des stéréotypes.
Ce Dossier de veille fait un état des recherches actuelles sur cette problématique des discriminations à l’école, aussi bien en France qu’à l’étranger. Les pratiques pédagogiques, les fonctionnements des établissements et de l’institution, la question du « vivre ensemble » (avec le concept de laïcité) et de la mixité (sociale, sexuelle, ethnique, etc.) sont des pistes à travailler pour lutter efficacement contre les discriminations à l’école.

Sommaire

Étymologiquement, le mot « discrimination » indique le fait d’établir une séparation ou une distinction entre les personnes et de les traiter différemment (crimen en latin fait référence au point de séparation). En droit, on parle de discrimination lorsque cette inégalité de traitement n’est pas fondée juridiquement.

L’intérêt porté aux discriminations est assez récent. L’UNESCO a tenu une conférence débouchant sur la publication en 1960 de la convention concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement. Cette convention rappelle que le principe de non-discrimination et le droit de chacun à l’éducation sont inscrits dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme. Dans ce texte, le terme de discrimination « comprend toute distinction, exclusion, limitation ou préférence qui, fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, l’opinion politique ou toute autre opinion, l’origine nationale ou sociale, la condition économique ou la naissance, a pour objet ou pour effet de détruire ou d’altérer l’égalité de traitement en matière d’enseignement ». Au niveau européen, la convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales de 1950 confirme l’interdiction de discrimination (article 14). Cette interdiction est complétée en 2000 par le protocole additionnel n° 12. Le principe de non-discrimination constitue un principe directeur dans de nombreux documents du Conseil de l’Europe, qui établit en 2010 un manuel de droit européen en matière de non-discrimination1 . Jusqu’en 2000, seuls les champs de l’emploi et de la sécurité sociale étaient concernés, et uniquement pour les discriminations fondées sur le sexe. Ce n’est qu’après deux directives européennes sur l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail (2000/78/CE) et sur l’égalité raciale (2000/43/CE) que le domaine d’application s’élargit aux biens et services. Sont donc concernés l’emploi, la santé, l’éducation et le logement.

En France, il faut attendre la loi de 2008 pour une mise en conformité avec les directives européennes, même si l’interdit de discrimination figure dans le droit pénal français depuis 1972. Il est resté formel et peu appliqué et ne concernait que les cas rares de discrimination raciste explicite.

La lutte contre les discriminations à l’école est abordée dans le référentiel des compétences professionnelles des métiers du professorat et de l’éducation de 2013 et est considérée comme un point essentiel des valeurs de la République que les enseignants doivent faire partager. La loi d’orientation et de programmation du 8 juillet 2013 promeut « l’inclusion de tous les enfants, sans aucune distinction » et « la lutte contre les discriminations »2.

L’Institut français de l’Éducation (IFÉ, ENS de Lyon) a initié le réseau de lutte contre les discriminations à l’école qui offre sur son site un espace de partage de ressources. À l’international se monte aussi un réseau (RIED : Réseau international éducation et diversité) à l’initiative de quatre pays (Québec, Suisse, Belgique et France), multidisciplinaire (sciences de l’éducation, psychologie, sociologie, science politique, histoire, langues, etc.), axé sur les problématiques de la diversité3.

Discriminations : de quoi parle-t-on ?

Définitions

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La discrimination renvoie à deux idées correspondant à deux approches différentes : faire des différences (approche par la psychologie) ou traiter des personnes différemment (approche sociologique ou par le droit). Dans ce dernier cas, l’inégalité de traitement est socialement située (c’est-à-dire qu’il n’y a rien de naturel dans cette différence) et s’inscrit dans la question des rapports de pouvoir. Les discriminations seraient à l’œuvre partout, rarement de manière explicite. Il s’agit de petites différenciations, sélectivités qui s’ajoutent les unes aux autres. Dans un rapport sur les mobilités sociales remis au gouvernement français en décembre 2013, la discrimination est définie comme un « processus sociopolitique par lequel l’on traite en pratique différemment et inégalement les personnes vues comme membres de groupes moins légitimes ou de moindre qualité sociale et politique » (Dhume & Hamdani, 2013).

Dans le droit français « constitue une discrimination toute distinction opérée entre des personnes (physiques ou morales) à raison d’une liste de critères a priori prohibés » (art. 225-1). Il y a donc un seuil à partir duquel la discrimination relève du droit. Ce seuil n’est pas sans poser problème car il sous-entend qu’il existe des discriminations « infra-légales ». Or celles-ci sont les plus nombreuses et font des dégâts d’un point de vue socio-psycho-politique. C’est pourquoi Dhume estime que la loi protège moins des discriminations qu’elle ne réglemente en mettant « de l’ordre dans la discrimination » au lieu de l’abolir. La logique juridique a ses limites : au pénal, il faut prouver l’intentionnalité des actes, or dans le cas de la discrimination, la responsabilité est collective, liée à un héritage culturel.

La loi du 16 novembre 2001, issue des deux directives européennes mentionnées ci-dessus, précise les critères prohibés : âge, sexe, origine, orientation sexuelle, handicap, état de santé, patronyme, caractéristiques génétiques, mœurs, opinions politiques, convictions religieuses, activités syndicales, appartenance vraie ou supposée à une ethnie, une nation, une « race », apparence physique, situation familiale. Cette liste de critères varie d’un pays à l’autre et n’est pas figée. Le Sénat a par exemple reconnu la discrimination par le lieu de résidence en janvier 2014 (article du Monde), ce qui en ferait le vingtième critère prohibé par la loi. L’ajout de ce critère était déjà préconisé dans une recommandation du Conseil économique et social en 2008.

Dans les années 1970, les luttes syndicales et politiques avaient pour objet les inégalités d’ordre social alors même que les discriminations étaient plus importantes qu’aujourd’hui, mais très peu médiatisées ou présentes dans la littérature. Avec l’entrée dans un nouveau modèle de justice où la recherche de l’équité et de l’égalité des chances prime, les discriminations deviennent essentielles, même si elles sont beaucoup moins nombreuses (Dubet et.al, 2013).

Les discriminations peuvent être classées en plusieurs catégories :

  • Discrimination directe : situation dans laquelle les critères de discrimination prohibés sont avérés. « Une discrimination directe se produit lorsque, pour des raisons de race ou d’origine ethnique, une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable » (directive 2000/43/CE). Ce type de discrimination est facile à prouver (par exemple avec des enquêtes de testing), mais n’est pas très fréquent ;
  • Discrimination indirecte : situation dont les effets globaux sont discriminatoires, sans que l’on puisse attribuer la discrimination à tel ou tel critère spécifique. « Une discrimination indirecte se produit lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes d’une race ou d’une origine ethnique donnée par rapport à d’autres personnes » (directive 2000/43/CE). Les discriminations indirectes sont nombreuses et plus difficiles à prouver. La reconnaissance des discriminations indirectes dans la loi française permet de constater des discriminations liées à des normes et/ou des pratiques en fonction de leurs effets inégalitaires. Aux États-Unis, le terme employé est disparate impact qui « désigne une mesure ayant un impact disproportionné sur un groupe protégé, même si la mesure est neutre dans son affichage » (Bereni & Chappe, 2011) ;
  • Discrimination systémique : Rebeyrol (2010) distingue une troisième catégorie où la discrimination systémique est un « processus qui met en jeu un système d’acteurs dans lequel personne ne manifeste directement d’intention discriminatoire, mais dont le résultat sera de produire une situation de discrimination ».

La Commission européenne inclut dans les discriminations ce qui relève du harcèlement et de l’injonction à pratiquer la discrimination (Deubel, 2013), dans le but d’offrir une protection plus étendue aux individus.

Lippert-Rasmussen (2006) distingue deux types de discrimination selon qu’elles seraient moralement acceptables ou pas. Les deux se basent sur des caractéristiques particulières (âge, sexe, race, etc.) :

  • les p-based discriminations (age-based, sex-based, race-based discriminations) : elles sont moralement acceptables dans la mesure où la volonté n’est pas de porter préjudice à telle ou telle catégorie (par exemple, lorsque l’on embauche des femmes à un poste de surveillant dans une prison de femmes) ;
  • les p-ist discriminations (racist, sexist, ageist discriminations) : elles sont moralement inacceptables car ont pour but de catégoriser les individus pour établir des droits différents.

Mais dans les deux cas l’auteur estime qu’elles ont des conséquences néfastes pour les discriminés. Il précise aussi que la discrimination envers soi existe, lorsque elle est intégrée par les individus visés, par exemple, les Afro-Américains sous les lois de ségrégation raciale aux États-Unis (Lippert-Rasmussen, 2006)4.

Si les recherches sur les discriminations en France sont peu nombreuses et relativement récentes, elles ont commencé aux États-Unis par des études sur les préjugés, ouvrant la voie aux travaux sur les discriminations, notamment raciales5. Il est à noter que les situations françaises et nord-américaines sont très différentes, la société étant organisée de manière multiculturelle outre-Atlantique, avec une identification forte à une communauté, alors que la France ne reconnaît que des individus. La comparaison entre ces deux systèmes n’a pas de valeur autre que d’apporter un éclairage particulier sur la problématique des discriminations. Le concept de discrimination ne fait pas l’objet d’un consensus scientifique en France, et la discrimination à l’école ne fait pas l’objet de recherches en particulier. Ceci peut s’expliquer par le fait que le statut de minorité ethnique n’est pas reconnu au regard de la loi qui ne considère que des individus. L’idéal républicain impliquait que les immigrés s’assimilent à la société française au fil du temps, le concept de discrimination n’était donc pas pensable.

Se développent plus récemment des deux côtés de l’Atlantique des recherches sur la diversité, terme beaucoup plus consensuel, mais sujet à polémiques : certains estiment que parler de diversité, c’est nier la spécificité des discriminations, d’autres y voient un objet plus consensuel qui permet de lutter contre les discriminations (voir la conférence de Simon à l’Université de Lorraine6). En France, le principe de diversité pose un problème particulier : s’il s’oppose pour certains à l’universalisme laïque, d’autres, comme la Ligue de l’enseignement, plaident pour un « pluralisme laïque impliquant le plein respect des sujets et de leurs convictions religieuses » (Lorcerie, 2012). Le concept de diversité est en opposition aussi avec le principe d’égalité. C’est pour cette raison que Mistral et Salzmann (2006) parlent de « la préférence américaine pour l’inégalité », ce à quoi font écho les propos de Dubet : « Accepter la diversité, c’est plonger dans un puits sans fond » où la règle commune disparaît peu à peu7 (Dubet et.al, 2013).

Un nouveau paradigme ?

Contrairement aux domaines de l’emploi ou du logement, le concept de discrimination à l’école ne fait pas l’unanimité. Certains chercheurs préfèrent parler de construction des inégalités, d’équité, d’égalité des chances, de ségrégation, de harcèlement, ou encore des problématiques liées à l’ethnicité ou l’ethnicisation des rapports par exemple.

La recherche aux États-Unis et en France n’a pas évolué de la même façon. Les sociologues français s’intéressaient davantage aux concepts d’inégalités et de domination sociale, alors que leurs confrères anglo-saxons s’intéressaient plutôt aux relations inter-ethniques (et donc à la discrimination). Malgré l’antériorité des recherches sur la discrimination outre-Atlantique, les chiffres montrent qu’elle est toujours à l’œuvre là-bas comme ici (Deubel, 2013). Cependant, une différence d’appréciation notable est à relever entre les deux pays. Alors qu’aux États-Unis, les descendants d’immigrés font partie de « groupes à tirets » (Italo-Américains, Afro-Américains, etc.), en France on distingue les « français de souche » des étrangers, ceux que le Royaume-Uni dénomme les « ethnics » et qui rejoint l’auto-appellation de certains en France qui se disent « originaires ». On peut parler d’« ethnicité relative à la jeunesse » (les « Arabes », les « musulmans ») qui est en rupture avec les rapports que les immigrés entretiennent avec leurs cultures d’origine. Ces auto-attributions ethniques sont le fruit des circonstances et peuvent changer en fonction des situations (Kabyles vs Arabes ; Arabes vs Français ; Parisien vs provincial, etc.). La question de savoir s’il s’agit de catégories ethniques ou sociales se pose (Streiff-Fénart, in Lorcerie, 2013).

En France, le concept de discrimination permet de renouveler la manière d’aborder les inégalités en les analysant en termes de rapport de pouvoir. La lutte contre les inégalités ne s’est pas avérée efficace et « ce que le principe de non-discrimination perd en généralité par rapport au principe d’égalité, il le gagne en effectivité » (Bereni & Chappe, 2011), en passant à une vision plus pragmatique de l’égalité. Le droit de la discrimination est plus tourné vers l’action.

Tout d’abord, il convient de distinguer la discrimination du sentiment de discrimination (Dubet et.al, 2013) : ce ne sont pas les personnes les plus discriminées qui se sentent le plus discriminées. Le sentiment de discrimination est d’autant plus fort que l’on se sent l’égal des autres. Les personnes qui se vivent comme des immigrés ressentent moins les discriminations dont ils sont victimes que les enfants d’immigrés, qui sont nés en France et qui ont souvent développé une hyper-sensibilité aux discriminations. Par ailleurs, celles qui doivent faire face à des difficultés quotidiennes telles que le chômage, les conditions de vie difficiles voient les discriminations comme un problème secondaire. Comme beaucoup de travaux, nous nous intéressons ici à l’articulation entre discrimination liée à l’origine, ségrégation et ethnicité.

Ségrégation

Une ségrégation est « une situation objective de concentration d’une population dans un espace qui lui est assigné, et un rapport social coercitif qui génère l’assignation de cette population à cet espace, rapport perpétué par des logiques systémiques et des pratiques sociales tendant à mettre à part cette population ou à la priver de droits. C’est donc un concept normatif, incompréhensible sans la référence à la norme d’égalité dont il implique la violation » (Lorcerie, 2003).

Pour Dubet, on parle de ségrégation lorsqu’il y a concentration d’inégalités (sociales ou autres) dans un milieu donné, rendant ce milieu relativement homogène. Les ressorts à l’œuvre ne sont pas les mêmes que ceux de la discrimination. Si les deux peuvent coexister, il peut y avoir discrimination sans ségrégation ou ségrégation sans discrimination (Dubet et.al, 2013).

La ségrégation à l’école correspond à une « configuration qui segmente la population d’élèves de sorte à mettre à part une catégorie d’enfants, en les affectant dans des classes où une carrière scolaire inférieure les attend » (Lorcerie, 2003). La mise à l’écart d’une sous-population ne se fait en général pas sur une base ethnique, mais dans les faits, les garçons issus de l’immigration se retrouvent souvent dans les mêmes classes.

La discrimination est complémentaire car elle organise un traitement différent pour des personnes et non pas des populations. Merle (2012) a montré que les ségrégations à l’école sont une réalité : ségrégations sociale, ethnique, académique (selon le niveau scolaire des élèves : existence parfois de « classes de niveaux » qui ne disent pas leur nom)… Les ségrégations sociales et académiques sont bien plus fortes en Allemagne, France ou Autriche que dans des pays comme la Finlande, mais moins qu’en Turquie ou au Brésil.

Les enfants issus de l’immigration sont plus victimes de ségrégation. Ces résultats sont corroborés par des travaux nord-américains. Le « racisme » qui est à l’œuvre dans ce processus est le fruit d’une « histoire collective, largement étatique, qui dépasse et traverse les individus qui […] mettent en œuvre » des discours de catégorisation. En France, l’histoire de la colonisation et celle des politiques d’immigration pèsent lourd dans les situations de ségrégation. Pour Dhume et al. (2011), le discours sur les différences culturelles entre les familles et l’école, mises en avant pour expliquer les difficultés des populations issues de l’immigration, s’explique par le « modèle républicain emprunt d’ethnocentrisme ». Pour Zoïa, « le nationalisme républicain incorpore une vision ethnique de la nation qui irrigue l’idéologie scolaire » (citée par Dhume et al., 2011). La notion de discrimination « renvoie à l’imbrication complexe de traditions théoriques et politiques, à la triple emprise du marxisme, de l’universalisme républicain et de l’impensé colonial » (Ben Ayed, 2011).

Ethnicité

En France, dans les années 1990, les recherches sur les discriminations se sont centrées sur le critère ethno-racial, principalement dans le domaine de l’emploi. Les préoccupations portaient sur l’intégration ou l’insertion professionnelle des jeunes issus de l’immigration, et faisaient écho à la lutte contre le racisme alors très active et à l’interculturalité8. Le concept d’ethnicité (ethnicity) apparaît en 1975 aux États-Unis avec les travaux de Glazer et de Moynihan. Il est importé en France dans les années 2000 avec les travaux de Felouzis (2005) sur l’« apartheid scolaire ». Dans l’hexagone, le terme « ethnique » pose problème. Au niveau du gouvernement et des agences publiques, on préfère parler de discriminations raciales plutôt que de discriminations ethniques. Aujourd’hui, on sait que « l’ethnicité est un fait social […] [qui] désigne la création et l’entretien de communautés […] sur la base de croyances à des origines distinctives » (Lorcerie, 2003).

Les différences de classes sociales ont toujours été prépondérantes pour expliquer les inégalités. Mais le rapport pédagogique n’a pas évolué. On préfère parler de publics en difficultés, publics difficiles, quartiers difficiles, établissements sensibles, etc., plutôt que de catégories ethno-raciales. Aujourd’hui, les catégories ethniques sont de plus en plus utilisées pour donner du sens à certains comportements, mais l’identité ethnique n’est pas figée, notamment du fait des processus d’assimilation (les immigrés se transforment en natifs). Les catégories ethniques que les individus utilisent pour s’auto-désigner ont de moins en moins de lien avec les groupes ethniques d’origine. On assiste à l’émergence de nouvelles identités, ce qui permet d’affirmer que l’ethnicité est variable et est très fortement liée à l’ici et maintenant.

« Le problème de l’ethnicité à l’école n’est pas un problème d’étrangers ou d’immigrés. Il est bien plus le problème de la séparation progressive – ou continue – d’enfants français, que l’on enferme dans une étrangeté supposée, construite » (Lorcerie, 2003).

Les différences culturelles sont socialement organisées. On crée et on entretient des frontières ethniques pour séparer les membres d’une communauté majoritaire et les outsiders. Les identités ethniques sont par conséquent temporaires et peuvent se modifier en fonction de stratégies diverses des uns et des autres (Streiff-Fénard, 2003). Analyse partagée par Debarbieux (in Lorcerie, 2003) lorsqu’il écrit qu’« il n’y a pas d’identité ethnique en soi » et qu’« il n’y a d’ethnicité que située ».

Il ne faut pas confondre ethnicisation et racialisation qui n’est qu’un genre de l’ethnicisation. Quand la racialisation « biologise la différence », l’ethnicisation « mobilise des stéréotypes en opérant de façon synthétique sur des particularités de toutes sortes, sociales, morales, physiques : sa notion de communauté d’origine est […] plus tribale (idée de groupe qui se perpétue) que strictement biologique » (Lorcerie, 2003). La discrimination n’est donc pas nécessairement basée sur des jugements moraux, à l’inverse du racisme.

Dubet  met en garde contre le passage d’une époque où les discriminations étaient niées à une tentation actuelle de tout expliquer par les discriminations. L’expérience de discrimination totale est très rare, tant les individus sont désireux de ne pas être définis par une seule composante ou identité qui leur est imposée. Les stratégies individuelles pour échapper à la discrimination varient selon les individus : humour, ruse, évitement, etc. (Dubet et al., 2013). Toutefois, c’est dans « l’accumulation des preuves de la discrimination en milieu scolaire [que les individus] vivent la discrimination et la stigmatisation comme une expérience totale, organisée autour d’une colère inépuisable » (Dagorn & Rui, 2013).

Peut-on assimiler un individu au groupe auquel il appartient sans le réduire à cette unique identité ? Pour Lippert-Rasmussen (2011), il est possible de faire de la « discrimination statistique » (traduction personnelle de statistical discrimination) tout en considérant les gens comme des individus à part entière. Il faut entendre par statistical discrimination le fait d’attribuer à tous les individus d’une population le comportement moyen de cette population, comportement établi suite à des enquêtes statistiques laissant la voie ouverte aux préjugés. Le profilage racial (aux États-Unis) est une composante de cette « discrimination statistique ».

La discrimination à l’école

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La discrimination dans la société est avérée mais quelles formes prend-elle au sein de l’école ? En 2004, un rapport pour la Commission européenne montrait que les discriminations directes et indirectes sont bien moins nombreuses dans le monde éducatif que dans les champs de l’emploi et du logement. Mais des formes de discriminations indirectes et institutionnelles au sein des systèmes éducatifs participent à la reproduction des inégalités (Luciak, 2004).

Le président de la HALDE9 pense que « le domaine de l’éducation est moins porteur de discriminations que d’inégalités » (Schweitzer, 2009). Dubet relativise aussi le rôle de l’école dans le processus de discrimination, estimant que les inégalités sociales en sont l’explication principale avec les ségrégations spatiales. Les élèves issus de l’immigration en situation de succès social estiment le devoir à l’école qui leur a permis de réussir malgré les discriminations dont ils se sentent victimes par ailleurs (Dubet et al., 2013).

Dans sa conférence sur les « Discriminations à l’école et dans la société » (Université de Lorraine), Simon rappelle que l’école reproduit des inégalités sociales qu’elle n’arrive pas à modifier. À cela se rajoutent les représentations (pas nécessairement conscientes) des enseignants qui par leurs choix (pédagogiques par exemple) vont défavoriser certaines populations. Les discriminations sont difficiles à percevoir car elles ne se posent pas à des moments signifiants, ne sont pas animées d’intentions et peuvent être « temporellement distendues » (Perrot, 2006), c’est-à-dire que leurs effets se voient plus tard. La moindre réussite scolaire des enfants de familles immigrées est avérée dans la plupart des pays d’Europe (OCDE, 2012).

Concernant la Belgique, une série de vidéos, issues d’un colloque organisé par Infor Jeunes Laeken, traite des discriminations dans le système éducatif francophone. On y trouve un historique de la législation (« décret inscription » de 2010 qui vise à favoriser la mixité sociale ; décret de 2008 pour mise en conformité avec la législation européenne, avec un renversement de la charge de la preuve). Il existe une discrimination systémique, favorisée par le système institutionnel, par des habitudes et des usages ancrés, sans qu’il y ait nécessairement intention de discriminer.

Le libre choix des écoles par les parents (le marché scolaire) est source d’inégalités, les familles n’étant pas égales devant ce choix. Des écoles deviennent de plus en plus des écoles-ghettos. Ce marché devrait être plus encadré et régulé pour favoriser la mixité sociale. Pour l’APED (Appel pour une école démocratique), la principale discrimination à l’école concerne l’origine sociale plus que l’origine ethnique des élèves.

Les vidéos sont à voir sur la chaîne YouTube de IJ Laeken, notamment les interventions de Bernard De Vos, Jean-Pierre Kerkhofs, Édouard Delruelle, et Anastasio Demagos.

Pour Ben Ayed (2011), l’école est un lieu à haut risque pour l’expression de discriminations. Elle « détermine fortement le rapport ultérieur des individus à la société dans son ensemble. On ne naît pas « Noir » ou « Maghrébin », mais on le devient souvent à travers l’expérience des rapports sociaux à l’école où le regard ethnicisant est mal vécu. « C’est bien la ségrégation ethnique qui crée l’ethnicité et non l’inverse » (Felouzis et al., 2005) : autrement dit, les « majoritaires » attribuent l’identité ethnique aux « minoritaires » (Lorcerie, 2003). Ceci peut développer le sentiment de racisme ou de discrimination avec pour conséquence possible l’identification par les élèves à l’identité qui leur est renvoyée, voire à sa revendication, ou au contraire à son rejet (Dhume & Hamdani, 2013). Le sentiment d’injustice varie selon les origines des élèves. Ainsi, les élèves d’origine maghrébine vivent moins bien leur orientation en lycée professionnel que les élèves d’origine portugaise ou française (Dhume et al., 2011).

Cependant certains chercheurs réfutent l’idée d’une école discriminante au regard de sa vocation à accueillir tous les élèves, à ne pas exclure sur des critères ethniques, contrairement au marché de l’emploi et du logement. Par contre, elle se débarrasse de ceux qu’elle ne sait pas intégrer (Castel, 2007).

La question des discriminations à l’école reste très complexe à appréhender et a une résonance particulière dans la mesure où l’éducation a des répercussions tout au long de la vie des personnes. L’éducation est non seulement un droit, mais c’est aussi un droit qui rend possible d’autres droits et favorise une insertion sociale et économique réussie (cf. le rapport How fair is Britain? de Equality and Human Rights Commission, 2010). Pour Tannock (2008), les idéologies du début du XXe siècle ont disparu et ont été remplacées par l’éducation (on parle d’États éducatifs), dans le sens où elle est devenue la « panacée universelle ». Une idéologie des compétences et de la formation s’installe au niveau mondial qui légitime et explique toutes les formes d’inégalités. Il y a donc une vraie discrimination à l’encontre des personnes peu éduquées, qui ne peuvent prétendre à l’égalité (aux niveaux social, politique, économique). Cette discrimination basée sur l’éducation (education-based discrimination) est à l’origine d’autres formes de discriminations, ethniques, de genre, de classe, etc. L’école ne joue plus son rôle pour ce qui relève de l’égalité des chances, ce qui explique qu’au niveau européen, les discriminations économiques affectent davantage les étrangers, quel que soit leur niveau de formation ou de qualification (Salama, 2010).

Les différents systèmes éducatifs n’arrivent en particulier pas à répondre de manière satisfaisante aux besoins des migrants et des minorités ethniques : ils sont souvent dans des classes de niveau inférieur à leur âge à cause de difficultés liées à la langue ; ils sont plus souvent orientés vers l’enseignement professionnel et technique ; ils sont souvent regroupés dans des établissements « ghettoïsés » ; ils souffrent de discriminations diverses ; leurs taux d’exclusion ou d’abandon scolaire sont plus élevés, etc. (Luciak, 2004). Certains groupes sont plus à même de subir racisme et discriminations : Roms, gens du voyage, réfugiés, musulmans, Noirs, Européens de l’Est, Africains, Asiatiques… En fait, on observe une hiérarchie en ce qui concerne la performance scolaire en fonction de la date d’arrivée des familles (autochtones vs première génération vs allochtones). « Plus le niveau socio-économique est faible, plus l’écart de performance est important ; et moins la langue parlée fréquemment à la maison est celle utilisée à l’école, plus cela explique l’écart de performance » (Salama, 2010). En France, on observe une forte concentration d’enfants immigrés dans les 25 % d’écoliers les plus défavorisés (statut économique, social et culturel faibles) : est-ce l’origine socio-économique de ces élèves qui explique leurs difficultés ou plutôt l’origine culturelle des familles ? La question n’est toujours pas tranchée.

Du côté de l’institution

L’administration de l’Éducation nationale contribue au manque de mixité ethnique dans certains établissements à plusieurs titres :

  • les instances (rectorats notamment) prennent des décisions qui leur assurent la loyauté des familles socialement et scolairement favorisées, ce qui tend à renforcer la ségrégation ;
  • les instances ont une approche essentiellement de gestion des structures et des personnes (coût éducatif, stabilité démographique) qui incite parfois à privilégier des demandes de dérogation de familles afin de « sauver » un établissement ou des postes (Laforgue, 2004).

L’origine ethnique est très rarement étudiée, contrairement au profil social ou au genre. Si la pénalisation des élèves issus de milieux populaires est avérée, notamment par le biais de l’orientation vers des filières défavorisées, il apparaît que les garçons d’origine maghrébine le sont plus que les autres. Le critère ethnique ajouté au critère de sexe prend beaucoup d’importance (Dhume et al., 2011). En fait, les discriminations ne sont que rarement isolables les unes des autres, ce sont souvent des cumuls de discriminations qui sont à l’œuvre.

Si les recherches ont eu tendance à évacuer la dimension ethnique, le système scolaire tend inversement à transformer des problèmes sociaux et scolaires en problèmes ethniques. C’est d’autant plus vrai que l’on se trouve dans « les maillons faibles du système scolaire » (collèges, lycées professionnels). Certains contextes particuliers peuvent accroître ou diminuer le racisme, ce qui met en lumière un « effet établissement » dans les processus d’ethnicisation : « les phénomènes ethniques à l’école sont intimement liés aux processus scolaires » (Perroton, in Lorcerie, 2003).

Ben Ayed (2011) liste des exemples de discriminations scolaires qui relèvent de l’organisation du système :

  • le choix de l’école : tout assouplissement de la carte scolaire accentue les discriminations. Les pays anglo-saxons ont d’ailleurs été amenés à mettre en place des politiques de déségrégation scolaire. Le rapport Obin et Peyroux (2007) fait le constat que l’assouplissement de la carte scolaire en France renforce les ghettos scolaires. L’OCDE (2008) met également en garde contre ce risque aussi ;
  • la catégorisation au sein des politiques d’éducation prioritaire : lorsque l’on cible des populations particulières au sein d’un espace donné ;
  • l’accès aux grandes écoles.

Les résultats scolaires diffèrent largement selon le sexe, le groupe socio-économique d’appartenance, l’ethnicité et le handicap. C’est ce qui ressort du rapport britannique How fair is Britain? Les filles d’origine chinoise sont les plus en réussite, alors que les enfants de familles gitanes ou issues des gens du voyage sont les publics les plus en difficulté. Concernant le handicap, les élèves à besoin éducatif particulier réussissent moins bien, surtout s’ils sont de milieu défavorisé. Les filles en général réussissent mieux, mais il y a une forte ségrégation selon les disciplines. Les minorités ethniques ont de plus en plus accès à l’université, mais les chances d’intégrer un parcours d’excellence scientifique restent limitées. Enfin, la composante géographique est importante en ce qui concerne les qualifications : les personnes issues du pays de Galles ou de minorités ethniques ou religieuses sont plus en difficulté (Equality and Human Rights, 2010).

De l’antiracisme à la lutte contre les discriminations

D’après Lorcerie (2003) l’idéologie nationaliste propre à l’École de Jules Ferry a disparu aujourd’hui, mais est toujours à l’œuvre dans les programmes scolaires, notamment en sciences sociales, histoire et éducation civique. L’« ethnonationalisme » est ainsi passé du curriculum prescrit au curriculum caché. C’est pourquoi la lutte contre les discriminations (cause nationale en 2002) n’a pas été transposée dans l’éducation, sauf de façon marginale dans les programmes d’éducation civique.

Parallèlement, la façon d’appréhender l’immigration dans la société a évolué : il était question de « seuil acceptable » dans les années 1960, puis de théories sur l’« échec scolaire » et la critique culturaliste dans les années 1970, pour finalement envisager l’immigration comme un « problème » dans les années 1980. L’antiracisme est activement promu à l’école depuis les années 1990 avec un discours hégémonique républicain, dans le but de souder la communauté nationale. Pour certains, l’antiracisme aborde la morale par des discours surplombants, qui restent inefficaces. Mieux vaudrait alors « reconstruire un engagement moral et politique à partir de l’expérience du monde social » (Dhume & Hamdani, 2013). Ainsi, adopter le paradigme de la lutte contre les discriminations serait plus pragmatique et plus efficace. L’approche antiraciste et l’approche centrée sur la lutte contre les discriminations ne sont pas forcément exclusives l’une de l’autre, et il y aurait des risques en ne conservant que la dernière à rester centré uniquement sur des pratiques sociales.

Il y a une forte contradiction entre le discours antiraciste et pour l’égalité citoyenne tenu par certains enseignants dans les quartiers défavorisés et le fait que « l’ethnicité est devenue un catégorie explicative des situations sociales et scolaires » (Lorcerie, 2003). L’auteur parle de « prédiction créatrice [qui] transforme les craintes en réalité » et accentue la fuite des familles et enseignants. Les agents de l’institution scolaire porteraient des « lunettes ethnico-raciales » lorsqu’il s’agit d’élèves et de parents issus de l’immigration, favorisant des « jugements ethniques » à tous les niveaux du système (Dhume & Hamdani, 2013 ; Lorcerie, 2012). Mais ces préjugés ne sont ni systématiques ni conscients, ce qui rend plus difficile la perception de cette discrimination systémique, tissée de micro-discriminations ethnico-raciales spécifiques et de logiques d’ethnicisation.

Des inégalités filles-garçons encore prégnantes

Bien que l’École française soit mixte10, « une mixité équilibrée est davantage l’exception que la règle » (Duru-Bellat, 2009). Harmand, lors de sa conférence sur les « Discriminations à l’école et dans la société » (Université de Lorraine), se base sur les travaux de Vouillot pour affirmer qu’il n’y pas vraiment de mixité à l’école : les filles et les garçons ne se mélangent pas dans les cours de récréation. Lorsque les enseignants placent leurs élèves dans la classe, en mettant une fille à côté d’un garçon, c’est souvent dans l’espoir que la première « civilise » le second. D’ailleurs, il est fréquent que les garçons perturbateurs soient perçus comme « ayant des capacités » alors que les filles sont davantage vues comme travailleuses, sérieuses et fournissant des efforts réguliers.

Les filles, malgré une meilleure réussite scolaire, se retrouvent dans des filières moins sélectives et moins valorisées que les garçons (Naves & Wisnia-Weil, 2014 ; Rebeyrol, 2010 ; MEN, 2013). Duru-Bellat (2009) tempère cette meilleure réussite des filles car elle ne serait avérée que pour les disciplines littéraires. Par ailleurs les enseignants ont moins d’interactions avec les filles qu’avec les garçons (respectivement 44 % et 56 %) et minimisent la réussite des filles, qui intériorisent ces différences. Les inégalités sont aussi fortement marquées dans les domaines du sport et de la culture. Les garçons ont une pratique sportive plus importante que les filles, un écart de 14 points existe entre les deux sexes, qui monte à 30 points dans les milieux les plus défavorisés. À l’inverse, les loisirs culturels concernent davantage les filles que les garçons, avec un biais social important cependant (Naves & Wisnia-Weil, 2014). Une éducation à l’égalité filles-garçons à l’école apparaît aujourd’hui comme une nécessité11.

L’homophobie, discrimination encore mal reconnue

La lutte contre l’homophobie, qualifiée de « discrimination discriminée » (Rebeyrol, 2010 ; Teychenné, 2013), tarde à s’imposer dans la société. Il faut attendre la fin des années 1990 pour que le milieu syndical s’en empare et 2003 pour que l’institution en fasse mention dans une circulaire. La HALDE se saisit de la question de l’homophobie en milieu scolaire en 2009. La frilosité de l’institution s’explique par l’absence de consensus sur les discriminations liées à l’homophobie et par sa méconnaissance du problème. Plusieurs lobbies s’affrontent, créant un rapport de force et une tension permanente. Pourtant l’homophobie se manifeste dès l’école maternelle à travers des injures, preuve que les jeunes enfants ont intégré des stéréotypes très tôt.

Il est très difficile d’obtenir des chiffres fiables concernant le harcèlement lié à l’orientation sexuelle, les élèves concernés n’en parlent pas souvent. En France, seuls 12 % des chefs d’établissement considèrent l’homophobie comme étant un problème important ou moyen, 86 % n’ont pas prévu d’action spécifique dans le cadre du CESC (Comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté). La mobilisation fait défaut, ces discriminations sont sous-évaluées et il y a toujours la crainte des réactions des parents, crainte d’autant plus forte avec l’actualité liée au « mariage pour tous » (Dagorn & Rui, 2013). Une étude américaine s’est intéressée aux performances scolaires de jeunes appartenant à des minorités sexuelles (LGBT : lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres), d’origines ethniques diverses (MSMY : multiethnic sexual minority youth) et a montré que leur expérience de discrimination avait un impact très négatif. Cependant, un fort soutien familial peut partiellement compenser cet impact, bien plus efficacement que le soutien de l’école ou des pairs (Craig & Smith, 2011). À l’inverse, une autre étude américaine, menée sur un très large panel, indique au contraire que des actions de soutien mise en place à l’école (tels que du personnel bienveillant, des mesures anti-harcèlement, des ressources curriculaires inclusives à l’encontre des LGBT) ont un impact positif réel sur la scolarité des jeunes concernés et sur le climat scolaire. Cette efficacité est renforcée aussi par l’existence de lois anti-harcèlement au niveau de l’État (Kosciw et al., 2012). Une loi a été votée au congrès en 2013, Student Non-Discrimination Act, pour protéger les élèves de la discrimination basée sur l’orientation sexuelle.

Des décisions d’orientation très orientées…

L’orientation scolaire telle qu’elle est pratiquée serait largement discriminante pour les élèves issus de l’immigration, non seulement en France (Dhume et al., 2011) mais aussi dans d’autres pays européens (Salama, 2010). Par exemple, les situations suivantes posent question :

  • Autriche : 21 % des enfants immigrés sont dans des  écoles pour élèves à besoins particuliers, handicapés mentaux ou physiques ;
  • Flandres, Pays-Bas, Allemagne : situation comparable mais de manière moins prononcée ;
  • France : sur-représentation des enfants immigrés dans les SEGPA ;
  • République Tchèque : les enfants roms ont 27 fois plus de risque de se retrouver dans une classe spéciale, pour handicapés mentaux, que les autres.

L’orientation est fortement marquée par les stéréotypes de genre, qui sont eux-mêmes véhiculés par les médias, la littérature de jeunesse, les magazines ou encore les manuels scolaires. C’est pourquoi en lycée professionnel, les établissements (ou les classes) sont très souvent sexuellement marqués : plus de 20 % des jeunes se retrouvent dans des filières comportant moins de 30 % d’élèves de l’autre sexe (Naves & Wisnia-Weil, 2014). À un âge clé de la socialisation, les élèves de lycée professionnel et de l’enseignement technologique se trouvent « démixés », particulièrement dans les familles populaires et issues de l’immigration. Les filles ont intériorisé le fait que « c’est dur d’être une fille » et leur ambition, malgré leurs résultats, reste toute relative dans leur choix d’orientation post-bac. Pourtant, la littérature n’est pas très abondante en ce qui concerne « la division sexuée de l’orientation » (Vouillot et al., 2011). Les inégalités de sexe ont toujours été masquées par les inégalités liées aux classes sociales. La France a de fait pris beaucoup de retard par rapport aux pays anglo-saxons. Cependant, Duru-Bellat (2009) note que l’orientation des filles dépend de nombreux critères ; le choix des options en seconde a son importance, or ces choix ne sont pas les mêmes selon les sexes.

La sur-représentation des élèves issus de l’immigration dans les filières scolaires de relégation montre que la question ethnique n’est pas qu’une surdétermination de la question sociale. À performance égale, ces élèves ont plus de risque d’être orientés vers des filières dévalorisées. Les mêmes discriminations sont à l’œuvre lorsqu’ils arrivent sur le marché du travail et connaissent davantage des périodes de chômage, des emplois plus précaires et plus souvent à temps partiel (Ben Ayed, 2011 ; Salama, 2010).

Les biais de notation et d’orientation sont multiples et articulent non seulement les catégories ethniques mais aussi le genre et la classe sociale (Perrot, 2006 ; Dhume et al., 2011 ; Bonnal, 2009). Des effets d’étiquetage des élèves par l’institution ont été avérés, conduisant à des parcours scolaires nettement différenciés selon le sexe des élèves ou les pays d’origine. Ainsi, la discrimination peut venir de pratiques bienveillantes, lorsqu’il s’agit par exemple de favoriser les filles d’origine nord-africaine. Les descendants d’immigrés d’Asie du Sud-Est sont en sur-réussite alors que les descendants d’immigrés turques ou maghrébins sont en sous-réussite. L’institution scolaire favorise l’étiquetage des élèves, étiquetage qui peut avoir des conséquences durant toute leur scolarité et au-delà.

Cette discrimination ethnico-raciale se confirme aussi lors de la recherche de stages. Elle concerne entre 30 % et 50 % des élèves d’origine étrangère (d’après un rapport de l’Inspection générale de 2000). La formation professionnelle et la formation universitaire sont aussi concernées (Dhume & Hamdani, 2013, Dhume, 2011 ; Dhume et al., 2011). On constate même une certaine passivité de l’école vis-à-vis des professionnels des industries qui pratiquent la discrimination. Devant des propos discriminatoires de la part des tuteurs de stages, les enseignants ont des difficultés à recentrer la négociation ou l’évaluation sur les compétences des élèves. Il arrive même souvent qu’il y ait une anticipation des enseignants qui sélectionnent eux-mêmes leurs élèves pour tel ou tel stage, participant de fait au processus de discrimination. Les normes de l’entreprise sont ainsi complètement intégrées par l’école12.

Le cas de la discrimination positive

Les premiers mécanismes de discrimination positive sont mis en place aux États-Unis dès 1965 (sous la présidence de Johnson), en Grande Bretagne, suite au rapport Plowden de 1967, et en Australie à partir de 1973. Dans les années 1980, c’est au tour de la France (1981), puis de la Belgique francophone (1989). Ensuite, des pays ou des régions comme le Chili, le Québec (1996), la Communauté flamande de Belgique, les Pays-Bas ou encore la Tunisie mettent en place des politiques de discrimination positive, dans une grande variété de dispositifs (Demeuse, 2005).

En France, les zones d’éducation prioritaire (ZEP) relèvent de la politique de « discrimination positive », même si le directeur de la HALDE juge ce terme inapproprié, lui préférant la notion d’« action positive », qui correspond davantage à ce que les américains nomment affirmative action (Schweitzer, 2009). Elles ont été créées en 1981 et sont centrées sur un territoire donné (ce qui évite la stigmatisation d’individus) afin de garantir une réelle égalité à tous et combler le fossé entre la proclamation d’une égalité formelle et les inégalités factuelles. Prime alors une logique de résultat, qu’il est nécessaire d’accompagner d’une logique de moyens, qui à elle seule n’implique pas une remise en cause de l’égalité formelle (Salama, 2010). La France a pris une autre voie que les États-Unis, en ne ciblant pas les personnes en fonction de leur appartenance (ethnique, religieuse, etc.) mais en ciblant des territoires à partir de critères sociaux. Dans les faits, les populations concernées sont souvent issues de l’immigration : « C’est dans les quartiers dits défavorisés qu’on trouve une forte concentration d’immigrés. C’est parce que ces quartiers sont défavorisés qu’il y a davantage d’immigrés qu’ailleurs et, à l’inverse, c’est parce qu’il y a cette concentration d’immigrés que ces quartiers sont défavorisés. Aussi est-il difficile de démêler les obligations de moyens de celles de résultats, et les mesures de discrimination positive des mesures sociales » (Salama, 2010).

Dhume et Hamdani (2013) estiment que « la définition même des zonages et des dispositifs, de la politique d’éducation prioritaire comme des politiques de la ville, se fait en incorporant des présupposés et des catégories ethniques ». Il y a donc opposition entre la volonté affichée de ne prendre en compte que la situation sociale et la réalité d’un dispositif qui conforte l’idée qu’il y a un « problème » lié à l’immigration : « Cette “discrimination positive à la française” a permis aux pouvoirs publics de ne pas nommer ni regarder les mécanismes d’ethnicisation et de racialisation ».

Dans l’espace urbain, la ségrégation ethnique est plus forte que la ségrégation socio-économique, surtout pour les populations originaires d’Afrique ou de Turquie (c’est moins vrai pour les Italiens ou les Espagnols). De fait, cette ségrégation impacte les écoles du secteur concerné. L’école ne se contente pas d’enregistrer la ségrégation existant sur son périmètre, elle l’amplifie parfois en adaptant l’offre scolaire au public, par exemple via le jeu des options. Ceci a pour effet d’établir une hiérarchie entre les établissements et de favoriser la fuite de certaines familles. Mais cette ségrégation n’est pas de la discrimination, pour certains, c’est davantage le fait des familles (plutôt aisées) qui privilégient l’entre-soi résidentiel (Barthon, 1998 ; Maurin 2004 et Oberti, 2007, mentionnés par Dhume et al., 2011). C’est pourquoi la labellisation des établissements d’éducation prioritaire pose problème dans la mesure où elle a pour conséquence une réduction de la mixité académique et sociale (Merle, 2012).

Les écoles devenant plus ségrégatives sur un plan social et ethnique que les quartiers dans lesquels elles sont implantées, cette ségrégation scolaire devient aussi une ségrégation ethnique. On peut donc dire que l’organisation d’un marché scolaire favorise une gestion ethnique de la réputation des établissements scolaires : « Les formes de gestion de la réputation s’appuient parfois clairement sur une ethnicisation des normes scolaires » (Dhume et al., 2011). Les codes d’« ethnie» et de sexe sont manipulés, notamment pour la confection des classes, dans le cadre d’une politique de gestion d’image de l’établissement.

Pour Hébrard (2007), les ZEP n’ont pas tenu leurs promesses car la ségrégation revient toujours en boomerang. L’opposition entre monde rural et monde urbain de la IIIe République, qui a façonné notre système scolaire, s’est mutée en opposition entre les banlieues et les centres-villes. L’école est aujourd’hui « enfermée dans la géographie de l’habitat urbain ».

Deux interprétations de la discrimination positive s’affrontent : certains estiment que cette discrimination s’oppose à la recherche de l’égalité et peut même aggraver les inégalités sociales. Aux États-Unis, les critères « race » et « ethnie » sont encore très discriminants malgré les politiques d’affirmative actions. Cela génère l’illusion qu’il existe réellement une méritocratie et que les difficultés ne relèvent que de différences individuelles (dans la culture nord-américaine, la pauvreté est le résultat d’un échec personnel). D’autres à l’inverse estiment qu’il est nécessaire d’établir cette inégalité formelle pour permettre à tous d’accéder à l’égalité réelle (Salama, 2010).

Du côté des établissements

Un des objectifs initiaux de l’école républicaine est de trier les élèves pour former les élites. Ce tri s’effectue en fonction des résultats scolaires, ce qui favorise le regroupement d’élèves en fonction de ces résultats. Même s’il n’y a pas de préjugé racial au départ, le résultat est tangible : la composition des classes montre une certaine ségrégation. Ces « mauvaises classes » de collège sont parfois le fruit de calculs pragmatiques pour éviter les mécontentements divers. Au final, il n’est pas rare de trouver dans des classes différentes les filles « françaises » et les garçons « d’origine maghrébine » (c’est plus ou moins vrai selon les établissements). Plus on avance dans la scolarité au collège, plus la différenciation ethnique est importante (Lorcerie, 2003). Même s’il n’y a pas de volonté de nuire à telle ou telle catégorie d’élève au départ, les organisations pédagogiques mises en place peuvent avoir pour effet de regrouper des enfants de minorités dans des classes ou filières particulières. On est bien dans un cadre de discrimination ethnique indirecte.

Pour les élèves, cette situation est le résultat d’un certain racisme et non d’un mécanisme. Pour le prouver, ils vont expliquer tous les incidents de la vie scolaire à travers ce prisme. Le fait que l’école ne sache pas comment gérer les différences ethnoculturelles et ait tendance à nier le phénomène favorise le sentiment de discrimination. Ce sentiment n’est par ailleurs pas partagé par les bons élèves, quels qu’ils soient (Dubet et al., 2013).

La discrimination ethnique peut se faire à l’intérieur des établissements, au niveau des classes, mais elle peut aussi se traduire par une politique de valorisation de l’image ethnique de l’établissement sous couvert d’éviter la fuite de certaines familles et empêcher une « ghettoïsation » de l’établissement. Une étude récente a par ailleurs mis en lumière des pratiques de discrimination liées à l’origine supposée des parents à l’entrée d’établissements scolaires privés (Du Parquet et al., 2013). En Angleterre et au pays de Galles, la discrimination basée sur les croyances religieuses est légale dans les écoles confessionnelles (faith schools) : il leur est possible de refuser l’inscription d’élèves ou l’embauche d’enseignants sur ces critères (Cherry, 2013).

Du côté des enseignants

Pratiques pédagogiques et dispositifs d’enseignement

Certaines pratiques pédagogiques et certains dispositifs d’enseignement non seulement ne permettent pas de réduire les inégalités, mais peuvent même être à l’origine d’un renforcement de ces inégalités du fait de l’« invisibilisation » des enjeux de savoirs13 (Rochex & Crinon, 2011).

Les élèves les plus faibles sont aussi ceux à qui l’on enseigne le moins, alors que « contrairement à ce que l’on croit, on ne ralentit pas les forts en mettant tous les élèves dans des situations pertinentes du point de vue des apprentissages, tous les élèves en ayant besoin, comme le montrent les faibles différences entre les élèves réputés faibles et forts quand ils se trouvent dans de telles situations » (Laparra & Margolinas, 2011).

Carignan dans sa conférence sur les « Discriminations à l’école et dans la société » (Université de Lorraine) rappelle que les stratégies pédagogiques des enseignants ne sont pas neutres : les approches non directives sont plus difficiles pour certains enfants, du fait de leur type d’éducation qui leur fera préférer les cours magistraux. Elle insiste sur la nécessité de diversifier les approches pédagogiques pour que tous les enfants puissent s’y retrouver14.

Comment expliquer que certains élèves issus de l’immigration soient en sous-réussite alors que d’autres sont en sur-réussite ? L’effet Pygmalion, qui veut que la projection des préjugés de l’enseignant sur les élèves devienne réalité, n’est pas une chimère. Le cas particulier des élèves asiatiques qui sont meilleurs en mathématiques que les autres pose question. S’agit-il d’une affinité culturelle particulière avec cette discipline ? Si plusieurs travaux américains et français l’attestent, d’autres estiment que ces élèves bénéficient de préjugés favorables (Dhume et al., 2011).

Quel est le rôle du genre dans la réussite ou non de certains élèves ? Une étude américaine a mis en évidence une attitude plus favorable des enseignants de mathématiques envers les garçons blancs qu’envers les garçons de minorités ou qu’envers les filles, indépendamment de leur origine (Riegle-Crumb & Humphries, 2012).

Une autre étude américaine a montré que les enseignants avaient tendance à davantage féliciter les élèves issus de minorités ethniques et se montraient moins critiques vis-à-vis de leur travail. Ce « retour positif biaisé » (positive feedback bias) a des conséquences négatives sur les élèves, malgré l’intention bienveillante de départ des enseignants, dans la mesure où ils se sentent dévalorisés et ne savent pas sur quoi faire porter leurs efforts (Harber et al., 2012). En France, si les garçons issus de l’immigration, de milieu populaire ont une réussite (ou un manque de réussite) comparable aux garçons de même milieu sans ascendance migratoire récente, les filles issues de l’immigration ont en revanche de meilleurs parcours que ceux attendus (Lorcerie, 2012).

Le cas des manuels scolaires

Carignan, dans sa conférence sur les « Discriminations à l’école et dans la société » (Université de Lorraine) explique que les contenus des manuels ne sont pas neutres, ils sont « ethnocentriquement » biaisés (les personnages présents sont souvent des hommes blancs, d’un milieu plutôt favorisé, à priori chrétiens et occidentaux, etc.) et font preuve de sexisme (Naves & Wisnia-Weil, 2014).

Tisserant et Wagner ont mené une recherche pour le compte de la HALDE sur la discrimination dans les manuels d’éducation civique et sur la place des stéréotypes dans tous les manuels, en ce qui concerne le genre, les origines, le handicap, l’orientation sexuelle et l’âge. Les auteurs pointent un manque de clarté entre le principe d’égalité et la discrimination, et un manque d’information quant à ce qui relève du pénal. Ils souhaitent un cadrage plus fort.

Concernant l’étude des stéréotypes, aucune recherche ne concerne l’ensemble des disciplines et des niveaux de classe, ni ne porte sur les cinq critères retenus. Les femmes sont largement sous-représentées dans les manuels, et lorsqu’elles le sont, elles sont la plupart du temps liées à la sphère domestique alors que les hommes sont liés au monde du travail. Les femmes ne sont pas les seules à souffrir de sous-représentation. Il en va de même pour les minorités ethniques qui sont représentées de manière stéréotypée : l’Africain est souvent pauvre et malade, le Noir américain violent, etc. Les personnes handicapées (même si des efforts sont notés), les personnes homosexuelles ou encore les séniors (souvent représentés comme inactifs) sont aussi sous-représentés (Schweitzer, 2009 ; Tisserant & Wagner, 2008).

Les plus discriminés sont, par ordre décroissant :

  • les homosexuels : ce sont les plus exclus et les plus ségrégués ;
  • les séniors : exclus et ségrégués, les manuels ne reflètent pas les efforts faits par la société ;
  • les handicapés : ils sont davantage exclus des manuels qu’ils ne le sont de la société ;
  • les minorités visibles : moins exclues que les précédentes catégories, mais pas suffisamment intégrées à la société ;
  • les femmes : dans des situations plus individualisées.

Les manuels seraient peu ouverts à la diversité, et cela se constate aussi dans la composition des équipes qui les rédigent. Il faut relativiser l’importance de ces résultats, car tous les enseignants n’utilisent pas forcément de manuels et le recours à des documents « authentiques » se fait de plus en plus fréquent, au moins en complément.

Le ressenti des élèves

Quand l’Éducation nationale traite des discriminations en son sein, elle se cantonne bien souvent aux pratiques des élèves. Or en ce qui les concerne, il ne peut s’agir de discriminations, car il n’est pas question d’un déni de droit. Il s’agit plutôt de brimades, harcèlements, violences, etc. qui restent difficiles à quantifier et qui nécessitent aussi des enquêtes de victimation. Les conséquences de ces formes de violence sont lourdes : solitude, phobie scolaire, mauvaise estime de soi, absentéisme, résultats en baisse, dépression, tentative de suicide et parfois changement d’établissement. On rajoute de l’exclusion à l’exclusion. L’expérience de discrimination est ambivalente pour les élèves : ils peuvent se positionner comme victime de discriminations, mais n’en sont jamais vraiment persuadés car ils trouvent aussi au sein de l’institution des ressources qui les protègent de l’institution. Pour compliquer le tout, les rôles ne sont pas définis une fois pour toutes, les victimes peuvent aussi être auteurs, et chacun peut être spectateur de discriminations (Costa-Lascoux & Rebeyrol, 2011).

Les traitements différenciés (évaluations, sanctions, soutiens divers, stages, etc.), la relation pédagogique avec l’enseignant, l’orientation sont autant d’expériences pouvant alimenter un sentiment diffus de discrimination, l’orientation étant vécue comme le « mécanisme clé de la discrimination » (Dagorn & Rui, 2013). Les élèves peuvent aussi en jouer pour embarrasser les équipes éducatives, et cela peut aussi les aider à donner un sens à leurs échecs. Il est indéniable que l’expérience scolaire est souvent vécue sous le prisme de la discrimination pour les élèves issus de l’immigration orientés malgré eux, traités différemment de leurs camarades, etc. (Dubet et al., 2013).

Aux États-Unis, société multiculturelle organisée en communautés, plusieurs études ont porté sur les populations latino-américaines et/ou afro-américaines. Elles ont mis en lumière le lien entre des discriminations vécues et une moindre motivation ainsi qu’une moindre réussite scolaire, et des effets néfastes sur l’estime de soi pouvant entraîner des états dépressifs. Les garçons sont beaucoup plus impactés que les filles, dans la mesure où celles-ci resteraient davantage cantonnées à des activités domestiques et souffriraient moins de ces situations de discrimination. (Alfaro et al., 2009 ; Cogburn et al., 2011). Le statut social de la langue minoritaire est important aussi : le sentiment de discrimination est plus fort chez les élèves qui servent d’interprètes entre l’école et leur famille. De même, ce sentiment augmente si la diversité ethnique dans l’établissement est plus importante, et « noie dans la masse » le groupe ethnique d’appartenance. Par contre, la diversité ethnique de l’équipe éducative aide à faire diminuer le sentiment de discrimination (Benner & Gaham, 2011). L’environnement scolaire (école et enseignants) a un rôle important dans la perception des discriminations et de l’identité ethnique des élèves (Brown & Chu, 2012).

Une autre étude qui concerne plusieurs minorités ethniques confirme que la discrimination institutionnelle à l’école, ainsi que la discrimination entre pairs (qui relèverait davantage du harcèlement ou de violences) a une incidence négative sur l’estime de soi chez les adolescents (Fisher et al., 2000). Il apparaît donc, aussi bien outre-Atlantique que chez nous, que les discriminations doivent s’appréhender en croisant différentes approches, notamment ce qui relève de l’origine ethnique et du genre.

Quant à l’orientation sexuelle, les jeunes homosexuels victimes de discriminations ou d’homophobie ont plus de risques de développer des troubles psychiques et des comportements à risque. L’école est le lieu où l’homophobie prend le plus d’importance (Higgins, 2001).

Des pistes pour lutter contre les discriminations à l’école

Une école inclusive

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Les rapports et les résultats de la recherche concordent pour préconiser une école inclusive. Cela revient à éviter les sélections précoces (early tracking) et la sélection par les résultats car cette dernière ne favorise pas l’équité (OCDE, 2008 ; OCDE, 2013). Un travail sur le climat scolaire s’impose, en créant notamment des « espaces de dialogues et d’instruction », en menant des actions aux niveaux politique (supprimer les stéréotypes), institutionnel (sensibilisation auprès des élèves et des enseignants) et psychosocial (Dagorn & Rui, 2013).

Cette école plus inclusive suppose de savoir traiter les problèmes en son sein et non pas à l’extérieur pour ne pas stigmatiser ou étiqueter les élèves (Dhume & Hamdani, 2013). Cela suppose aussi de travailler le lien entre l’école et les familles, avec des actions d’aide à la parentalité, notamment en ce qui concerne les devoirs, même si ces derniers ne sont pas conseillés tant ils renforcent les inégalités entre élèves (OCDE, 2008 ; OCDE, 2013). Le rôle des chefs d’établissements et des inspecteurs est important pour créer les conditions favorables au « vivre ensemble » (Costa-Lascoux & Rebeyrol, 2011 ; Dagorn & Rui, 2013). Il convient de rendre « l’école plus inclusive dans une société qui s’ouvre à l’altérité » (Gossot & Rault, 2011)15.

Cette inclusion passe par la mise en place « d’une réelle politique scolaire qui aurait pour objectif explicite de lutter contre la ségrégation » en revoyant notamment la carte scolaire, en laissant davantage de choix aux familles, mais en régulant ce choix (Felouzis et al., 2005). Hébrard (2007) préconise quant à lui d’imposer une certaine mixité sociale en créant des établissements « multi-implantés » avec le recours aux outils numériques : un établissement implanté sur plusieurs secteurs différents avec des équipes et des élèves qui peuvent travailler sur chacun des sites. « Si l’on veut promouvoir la mixité à l’école, on se heurte donc à un double obstacle : les familles n’en veulent pas, les enseignants n’ont pas appris à la gérer. La position des politiques est d’autant plus délicate. Elle n’est pourtant pas intenable comme certaines expériences l’ont montré (par exemple, celle mise en place par Richard Descoings à Sciences Po). Je n’en avancerai ici qu’une parmi bien d’autres possibles : remplacer le “zonage” par la “pluri-implantation ». Comme pour le décrochage scolaire, les moments de transitions à l’école sont particulièrement fragilisants (Thibert, 2013), ils ne favorisent pas une école inclusive puisqu’ils renforcent les effets discriminatoires. Le système finlandais comporte des exemples de continuum curriculaire bénéficiant à tous les élèves (Feyfant, 2013).

Des pistes pédagogiques

Les relations enseignants-élèves ont leur part de responsabilité dans le sentiment de discrimination des élèves. C’est ce qui ressort d’une étude comparative entre la France et l’Australie consacrée au vécu d’élèves d’origine turque en classe de première. En Australie, les jeunes d’origine turque sortent du système scolaire en ayant confiance en eux et en leurs professeurs, alors que c’est l’inverse en France. Ceci tient à des rapports pédagogiques différents, avec beaucoup plus de collaboration entre enseignants et élèves ou entre élèves et l’absence de notes en Australie (Lorcerie, 2012).

L’amélioration des pratiques enseignantes dès le primaire est primordiale pour éviter les phénomènes de sédimentation des inégalités. Au sein de la classe, le recours à des pédagogies alternatives est encouragé plutôt que de recourir au redoublement. Dans la même optique, passer à une évaluation formative et non pas uniquement normative permettrait de limiter les échecs (OCDE, 2008). Au niveau des enseignants, le développement du travail en équipe, de la coopération, de la mutualisation des pratiques professionnelles sont des pistes à étudier.

Ces pistes pédagogiques s’accompagnent d’une formation des enseignants qui doit s’appuyer sur l’idée que la diversité n’est pas une menace mais une richesse. Il s’agit de mettre en place une formation interculturelle. La formation est à penser de manière active, car une information ne suffit pas (Vouillot et al., 2011).

La laïcité comme arme de lutte contre les discriminations

Toute discrimination viole le principe de laïcité16, principe qu’il est essentiel de réaffirmer pour favoriser la mixité, pour accueillir et ne pas exclure (Rebeyrol, 2010). « La non-discrimination apparaît donc comme consubstantielle à la la laïcité, celle-ci étant en quelque sorte garante de celle-là » (Redor-Fichot, 2005), même si les deux principes ne se confondent pas. La plupart des pays ne connaît pas la laïcité et trouve d’autres voies pour lutter contre les discriminations. Ainsi, le Québec favorise les « accommodements raisonnables » en cherchant un compromis à chaque fois qu’une difficulté apparaît, en n’acceptant aucune discrimination et en visant l’égalité des personnes. Cela peut signifier trouver des traitements différentiels (Carignan dans sa conférence sur les « Discriminations à l’école et dans la société »).

Liée aux questions de discrimination, la laïcité telle que nous la connaissons en France fait débat. La laïcité a par exemple trouvé de nouveaux adeptes ces dernières années en France, mais qui l’instrumentalisent pour viser une religion particulière (l’Islam en l’occurrence) qui irait à l’encontre d’une « identité française ». C’est pourquoi Bouchet et Forestal (2013) estiment qu’il est important d’éduquer à la laïcité.

Certains auteurs estiment que le projet laïque n’est plus émancipateur aujourd’hui, parce qu’il est le produit d’une histoire nationale empreinte de raison et de rationalisme et qu’il vient donc heurter ceux qui n’ont pas la même histoire. Il faudrait « éduquer en tenant compte de la pluralité des valeurs morales cohabitant dans la société » (Zoïa, 2013). Le président de la HALDE récuse totalement cette interprétation qui lie les discriminations à l’histoire coloniale de la France et estime que la laïcité est une chance pour la lutte contre les discriminations (Schweitzer, 2009), car elle permet de créer une unité nationale tout en respectant la diversité de la société (Bouchet & Forestal, 2013).

Un État laïque devrait s’abstenir sur les questions d’identité des individus (Lorcerie, 2012). La laïcité signifie-t-elle limitation du pouvoir des institutions ou normalisation des publics ? Il y a confusion entre ces deux acceptions qui conduit à une « crispation idéologique » et empêche les compromis locaux. Dans le « Rapport sur la mobilité sociale », les auteurs estiment qu’il est fait un usage problématique de la laïcité : « la réaffirmation incessante de la “laïcité” comme un pré-requis produit l’inverse de ce que l’on voudrait : elle fabrique de la distance là où on prétend souder la communauté » en stigmatisant certaines populations. Dhume et Hamdani (2013) y voient un enjeu idéologique pour le nationalisme. D’autres parlent d’« exclus de l’intérieur » : « L’exclusion qui les frappe est le produit de mécanismes d’occultation, de dénégation et de discriminations qui relèvent d’un usage pervers du modèle républicain. Un universalisme proclamé mais aveugle aux différences a conduit en fait à stigmatiser les différences ethniques et les a enkystées dans leur particularité, suscitant en retour la rage et la révolte de ceux qui se sont sentis piégés parce qu’ils continuent d’être marqués par une appartenance dont on leur renvoie une image infamante » (Castel, 2007).

Deux conceptions de la laïcité s’affrontent, une laïcité dite « de combat » qui milite pour l’ignorance de l’État envers les religions, et une laïcité dite « ouverte » qui promeut la reconnaissance du fait religieux. Ces dernières années, le débat s’est déplacé vers l’égalité entre les sexes qui serait mise à mal par certaines croyances. Pour conclure, les propos de Redor-Fichot (2005) sont toujours d’actualité : « Entre une laïcité ouverte qui risque de déboucher sur l’acceptation de discriminations sexuelles et une laïcité de combat qui stigmatise certains individus en raison de ce que l’on croit comprendre de leur convictions religieuses, la route est donc étroite pour une application du principe de laïcité également respectueux de la liberté de chacun ».

bibliographie

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Citer ce billet
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  1. Les caractéristiques protégées par le droit européen sont le sexe et l’orientation sexuelle, le handicap, l’âge, la race, l’origine ethnique, la couleur de peau, la nationalité ou l’origine nationale, la religion ou les convictions, la langue, l’origine sociale et les opinions (politiques ou autres). []
  2. Pour un historique rapide de la lutte contre les discriminations en Europe et en France, on peut lire Deubel (2013) et Schweitzer (2009). []
  3. L’IHEU (International Humanist and Ethical Union) a publié en 2013 un rapport sur les discriminations dont sont victimes les non-croyants et les athées dans le monde, avec une carte interactive des discriminations dans le monde. Les discriminations diminuent avec l’augmentation de l’éducation et des revenus (Cherry, 2013). []
  4. Lire aussi Lippert-Rassmussen (2014) pour ces questions de morale et de discriminations. []
  5. Sur le rapport entre discriminations et droit, discriminations et sociologie, une analyse comparée des situations française et nord-américaine est à lire dans l’article de Bereni et Chappe (2011). []
  6. Les conférences présentées par l’Université de Lorraine dans le cadre de la grande leçon « Discrimination à l’école et dans la société » sont accessibles sur Canal U  : partie 1 et partie 2. []
  7. On peut lire à propos de l’opposition entre égalité et diversité le livre à charge de Michaels (2009). []
  8. Pour un historique de l’interculturalité à l’école, voir Lorcerie et Morel (2003). []
  9. Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, remplacée en 2011 par le défenseur des droits. []
  10. Sur la mixité scolaire, lire le numéro 171 (mai 2010) de la Revue française de pédagogie, dirigé par Duru-Bellat et Marin : « La mixité scolaire, une thématique (encore) d’actualité ? », qui fait suite à la conférence de consensus de 2009 organisée par l’IUFM de l’académie de Créteil, ainsi que le dossier d’actualité de la VST de septembre 2008 sur « Genre et éducation ». []
  11. Voir le rapport suédois sur l’égalité des sexes dans l’éducation dans plusieurs pays en voie de développement avec lesquels la Suède collabore dans le cadre de l’agence suédoise du développement international (SADEV, 2010). []
  12. Voir aussi le rapport de Bonnal (2009) : « Accès à la propriété, orientation scolaire et inégalités de revenu : une analyse des discriminations », ou encore l’article de Zirotti (2006) sur le jugement des élèves issus de l’immigration sur les décisions d’orientation scolaire. []
  13. Pour approfondir sur le discours pédagogique qui (re)produit des inégalités sociales (de classe, de sexe, de race et de religion), on peut lire Bernstein (2007) : Pédagogie, contrôle symbolique et identité : théorie, recherche, critique. Laval : Presses universitaires de Laval. []
  14. Pour les effets des pratiques pédagogiques sur les apprentissages, voir Feyfant (2011). []
  15. Sur l’éducation inclusive en Europe, lire l’article de Danielle Zay dans Administration et éducation de décembre 2011 (Zay, 2011). []
  16. Dans la littérature anglo-saxonne, le terme utilisé qui se rapproche le plus du concept de laïcité est « secularism ». []

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